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Portrait de Maxime Chattam, juré d’Au-delà des lignes

Vendredi matin, maison d’arrêt de Rouen, dans le bureau des professeurs. Maxime Chattam, l’un des plus grands auteurs de thrillers français, est là, attablé autour d’un café avec le responsable de l’enseignement en prison, les enseignants et Jeanne Lemonnier, responsable du projet Au-delà des lignes. Tout sourire, il prend des informations sur les trois groupes de détenus qu’il va rencontrer dans le cadre du Concours d’écriture Au-delà des lignes*.

 

 

La journée débute avec les rencontres successives de deux groupes de mineurs. L’après-midi sera consacrée à un groupe d’adultes débutants. Chaque rencontre commence par un tour de table, l’occasion pour Maxime Chattam de se renseigner sur l’intérêt pour la lecture et l’écriture de chacun des participants. Habitué à l’exercice, l’auteur tente d’aller chercher d’autres réponses que « j’aime bien lire » : « Et qu’est-ce que tu ressens quand t’écris ? C’est ça qui est important ».

 

 

Un parcours atypique

Pour désacraliser l’écriture, il évoque rapidement son propre parcours. Il a grandi dans un milieu modeste, a fait quelques bêtises de jeunesse, et détestait l’école – il précise avoir redoublé au collège. Mais il aimait lire, et il passait du temps le nez dans les bouquins. Au lycée, il occupait ses cours à écrire des histoires plutôt que de prendre des notes. Un jour, sa professeure de Français trouve ses histoires, inspirées de la vie de ses amis : « C’est très mal écrit, mais tu as de bonnes idées, il faut que tu bosses ».  A partir de ce moment-là, Maxime Chattam écrit tout le temps, obtient son bac, écrit et multiplie les petits boulots en parallèle. Après 3 livres refusés par les maisons d’édition, il parvient enfin à publier son premier livre L’Âme du Mal, en 2002.

Le déclic donné par cette enseignante, il l’espère pour ces mineurs : « Souvent en maison d’arrêt, on me dit, ‘je n’y arriverai pas, je suis une brêle en Français’. Est-ce que vous avez envie de mettre le temps que vous passez ici à profit? Le concours c’est un prétexte qu’on vous donne. Il est là pour voir ce qui sort quand vous écrivez. »

 

 

Une double motivation à participer au concours

Quand un élève ose poser la question du montant touché par l’auteur pour venir les rencontrer, Maxime Chattam part d’un grand rire : non seulement il n’est pas rémunéré pour participer au concours, mais surtout, sa motivation est ailleurs…

Elle réside dans deux choses : d’abord, les rencontres humaines : « J’aime l’être humain, je suis curieux des autres. C’est une expérience humaine et un moyen de me sentir utile. Je sors d’ici plus riche que lorsque je suis rentré ».

Autre motivation, la découverte des textes des participants : « C’est la 5ème année que je participe, et je peux vous dire qu’il y a des textes en 5 ans qui m’ont retourné. Parfois, on se prend des claques. »

En effet, pour la cinquième édition consécutive, Maxime Chattam est aux côtés de la Fondation en tant que membre du jury d’Au-delà des lignes. Cette année encore, il rencontre différents groupes de détenus dans les prisons de Rouen et de Beauvais, et défendra corps et âme ses textes favoris lors de la sélection des textes lauréats. Rendez-vous début juin pour savoir si ses collègues du jury seront en phase avec lui.

 

     

* À propos du concours d’écriture Au-delà des lignes :

Pour la cinquième année consécutive, la Fondation du Groupe M6 organise en 2020 le concours d’écriture « Au-delà des lignes » en milieu carcéral, en partenariat avec l’Éducation nationale et l’Administration pénitentiaire. Il a pour objectif de lutter contre l’exclusion des personnes en rupture avec l’écriture. Chaque édition se déroule en deux temps : des ateliers d’écriture menés par les enseignants de l’Éducation nationale à destination de 3 catégories : débutants, intermédiaires, confirmés ; puis la sélection des lauréats par un jury composé d’écrivains, de journalistes et de personnes issues de l’Éducation nationale, de l’Administration pénitentiaire et de l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI).